Confinés ou pas nous devons manger pour vivre et cela ne peut se faire virtuellement ! Les longues files d’attente devant les supermarchés au début du confinement et l’organisation prioritaire de distribution des vivres pour les nécessiteux ont souligné cette réalité.
Malgré son climat et son terroir favorables, l’Ile Maurice est un pays importateur net de produits alimentaires .En 2014 nous avons importé 77% de notre nourriture pour un montant de Rs38Milliards ! L’appréciation du dollar Américain et les difficultés économiques à venir devraient nous motiver à nous affranchir de notre dépendance sur les pays étrangers pour notre approvisionnement alimentaire.
Aussi, la volonté des autorités à adresser vigoureusement tout obstacle a la bonne santé de l’agro-industrie telle qu’elle fut exprimée le 15 Avril dernier par le Ministre de tutelle, Mahen Gobin ; mérite d’être saluée.
Nécessité de lutter contre le vol
Affichés sur les réseaux sociaux et dans les medias, les vols de légumes et autres cultures, les uns plus spectaculaires et plus crapuleux que les autres, ne manquent pas d’interpeller. La crise sanitaire actuelle a amplifié une situation qui prévalait déjà. Ainsi mise en lumière, elle souligne l’urgence des mesures salutaires renforcées et appliquées avec rigueur.
Alors que certains cultivateurs regrettent la perte régulière de leurs produits, d’autres y laissent même leur vie. Ce n’est ni Monsieur Persand, dont le barachois a été visité pour la sixième fois le 15 Avril dernier, ni les proches de Prakash Caunhye, cultivateur de Goodlands, mortellement agressé par des voleurs dans sa bananeraie, ce 3 Avril, qui nous diront le contraire ! Comment faire l’impasse sur cette double tragédie où un planteur, las de se faire tondre, se serait jeté à bras raccourcis sur un voleur récidiviste pris en flagrant délit dans son champ de piments. Ce dernier y a perdu la vie alors que son présumé agresseur doit répondre d’une accusation de meurtre. La mise en garde des autorités aux voleurs est sans équivoque : Ils auront à faire face à la justice! Cela est encourageant, car rien n’est plus mauvais que l’impunité, ne serait-ce que dans la perception seule. Nous ne pouvons que souhaiter que tout soit mis en œuvre pour protéger davantage les planteurs et dissuader les voleurs. Ces derniers, toutes catégories confondues, constituent plus de 50% de la population carcérale dont 70% sont des récidivistes.
Vulgariser l’agriculture au niveau scolaire
La détermination affichée pour faire reculer les vols est tout aussi appréciable que l’appel à un retour à la terre produisant nos propres légumes, même au niveau individuel. Valoriser les potagers peut non seulement contribuer à l’autosuffisance alimentaire mais peut aussi participer à une meilleure santé publique.
Des 846 écoles pré primaires, 318 écoles primaires, 178 collèges académiques et 111 institutions pré vocationnelles que dispose le pays, combien sont-ils à posséder un potager ? Dans le contexte actuel, ne serait-il pas souhaitable que les quelques 230,000 élèves fréquentant ces institutions soient sensibilisés à l’agriculture ne serait-ce qu’à travers leur exposition régulière a un jardin ? Et, si nous voulons aller plus loin, pourquoi ne pas relancer l’agriculture comme une option d’études prometteuse ?
Changer de mentalité
Il est regrettable que les métiers de l’agro-industrie soient méprisés par bon nombre de personnes. Est-ce aussi facile de séduire avec le slogan « Un planteur par famille » qu’avec celui de « Un gradué par famille ». Tout en sachant que le premier n’exclut pas l’autre ? Victor et Laura qui ont été cadres à l’étranger pendant de longues années ne trouvent-ils pas un immense plaisir à cultiver leurs terres à Bois Chéri depuis quelques mois ? Ils m’ont même confié que cette activité pourrait servir de plan de contingence pour leur fils, évoluant en Europe, si toutefois la malchance arrivait à toucher son emploi là-bas.
Enregistrés comme petits planteurs, ils profitent de l’air frais de leur terrain tout en s’adonnant à une activité enrichissante sur tous les plans !
Conclusion
Notre sol volcanique fertile a assuré pendant des siècles notre survie. Fécondé par la sueur de nos ancêtres et les faveurs du climat tropical, il ne demande qu’à être mis en valeur pour nous prémunir de l’impact d’une possible crise alimentaire.
Lorsque les bonnes volontés citoyennes sont semées dans le terreau fécond de la détermination des autorités, la moisson ne peut qu’être abondante. Préparons ensemble l’après confinement, les enjeux demandent un réajustement car tout n’est plus comme avant.
Si nous combattons les préjugées, décourageons les vols et valorisons l’agriculture à tous les niveaux, il n’y a pas de raisons pourquoi nous ne serions en mesure de produire notre propre nourriture .Ce qui soulagerait notre balance de paiement, contribuerait à la création d’emplois et assurerait une sécurité dans les temps difficiles.