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Un budget pour soulager la dette des ménages

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L’exercice budgétaire est un rendez-vous annuel très attendu par la population qui espère y trouver des mesures qui amélioreront leurs quotidiens. Dans la situation actuelle, l’endettement des ménages devrait être traité en  priorité. Rappelons qu’une des mesures les plus commentées du Covid Act reste les nouvelles attributions de la banque de Maurice. Mais il est bon aussi de souligner que la capacité d’endettement des compagnies a également été revue à la hausse. Le plafond normalement utilisé en justice pour déterminer  l’insolvabilité d’une compagnie a été augmenté de Rs 50,000 à Rs 100,000.

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Cette décision du législateur renforce l’idée que la stratégie du gouvernement est d’utiliser la dette pour surmonter la crise. Il faut aussi souligner que nous avons déjà un niveau d’endettement qui dépasse notre Produit Intérieur Brut (PIB) de 65%.  Dans le même temps, le Fond Monétaire International prévoit que notre PIB connaîtra une baisse de 6.8% et que le taux d’inflation va s’accroître de 4.7%.

Ces prévisions ont été confirmées à la hausse par le Ministre des Finances, ‘Renganaden Padayachy, qui a dit le vendredi 1er mai qu’avec le confinement et la crise sanitaire, le pays perdra environ 10% de sa richesse, soit un total d’environ Rs 50 milliards. « Le plus grave, c’est que cela engendrera un ‘mass unemployement’. Les provisions prédisent jusqu’a 100 000 chômeurs jusqu’à la fin de l’année »’. Cela veut dire que l’argent imprimé par la banque de Maurice aura encore moins de valeur.

À la fin de juin 2019, la dette des ménages représentait 21,8 % du Produit Intérieur Brut (PIB) contre 20,9 % du PIB à la fin de décembre 2018. Il s’agit d’un montant global estimé à plus 100 milliards de roupies. La qualité de cette dette est aussi un facteur à considérer en ces temps de crise, les chiffres publiés par la banque de Maurice à la fin de l’année 2019 indiquent qu’il y a moins de prêts hypothécaires et plus de prêts à la consommation. La banque de Maurice relève aussi que les banques commerciales sont libres de pratiquer le ratio de « Loan to value (LTV)» qu’elles souhaitent. Le LTV est un ratio qui se calcule en rapportant la dette à la valeur réévaluée des actifs. En pratique, cela veut dire que plus le LTV ratio est élevé, plus cher sera le crédit. En l’occurrence, les crédits proposant les facilités connues à Maurice comme le « zéro dépôt » sont les plus chers, si par contre l’emprunteur fait un dépôt cela réduit le coût de son crédit. Toutefois, sur le marché mauricien cela n’est pas forcément vrai parce que les sociétés de crédits proposent de prolonger le remboursement en diminuant le montant des échéances mensuelles. C’est ce que la banque de Maurice présente simplement comme le goût du risque des différentes institutions de crédit et des banques.

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Bank of Mauritius, Annual bank report 2012, pg 64
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Selon notre banque centrale, l’abolition de la limite du ratio LTV et les taux d’intérêts attractifs ont positivement influencé la demande pour le crédit des ménages. Cette politique de la dette n’a pas vraiment changé avec les régimes ou les années, déjà en 2012 la dette des ménages occupait la plus grosse part dans la distribution des crédits, à hauteur de 26.3% :     

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Bank of Mauritius, Annual bank report 2012, pg 21

Cela a été une politique constante des différents dirigeants du pays quel que soit le régime en place PTR ou MSM. Malgré les leçons que le monde aurait-dû tirer de la crise des « subprimes », à Maurice les crédits sans garantie qui coûtent plus chers pour le consommateur et qui créent une bulle spéculative, ont été encouragés. L’Etat est responsable de cette situation et paradoxalement aujourd’hui, le pouvoir politique autorise des baisses des salaires à hauteur de plus de 50% et légifère pour permettre aux employeurs de ne plus payer les heures supplémentaires. Ces mêmes heures supplémentaires qui ont été intégrées dans le calcul du LTV par les banques pour évaluer le niveau de crédit auquel pouvait s’exposer un consommateur.

Il faut que le gouvernement dans son budget 2020-2021 montre plus de responsabilités, car il est de son devoir de contrôler l’impact que les défauts de paiement vont avoir sur des centaines de milliers de familles mauriciennes. Certains vont perdre leur emploi et d’autres verront leurs rémunérations réduites de moitié comme annoncé par le groupe New Mauritius Hotel Ltd (NMH) ou encore notre compagnie aérienne nationale. Il était de la responsabilité de l’Etat de mettre en place les paramètres nécessaires pour protéger les ménages du surendettement. Il serait donc normal de s’attendre à ce que le gouvernement assume la responsabilité de ses manquements. Surtout, en ce moment où l’argent des contribuables, c’est-à-dire ces mêmes ménages qui n’ont pas été protégés contre le surendettement, sert pour le « Wage Assistance Scheme » dont bénéficie les entreprises qui réduisent les salaires de moitié.

Nous l’avons vu en introduction, le niveau requis pour qualifier d’insolvable une compagnie a été revu à la hausse avec un ratio de 100%, pendant ce temps les ménages ont disposé d’un moratoire sur les intérêts et pour les prêts immobiliers uniquement, type de prêt dont la part de marché ne cesse de baisser selon la banque de Maurice.

Le poids de la dette des ménages sera encore plus grand dans un tel contexte. Est-ce que le gouvernement viendra avec un plan pour secourir les ménages et leur épargner la saisie des biens impayés? Nous parlons là de motocyclettes, de voitures, d’outils numériques tels que les téléphones et les ordinateurs portables.

Il est peut être nécessaire de créer un cadre légale de faillite civile, notamment pour protéger les salaires des emprunteurs mais aussi des garants pour les prêts accordés par les différentes institutions de crédit, incluant les « Mutual aid ».

Il paraît normal aussi que ce soit aux banques et aux institutions de crédit de devoir supporter les conséquences de leur goût du risque qui les a poussés à accorder massivement des prêts sans garantie, pour des motifs aussi farfelus que des vacances à l’étranger. En droit il existe différents niveaux de responsabilités selon que vous soyez un professionnel du secteur ou pas, en l’occurrence ce sont les professionnels du crédit qui ont créé ce contexte de surendettement. Est-ce que le gouvernement aura la lâcheté de rendre responsable les consommateurs d’un produit que ces derniers n’avaient aucun moyen de savoir avarié ?

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Ivor Tan Yan
Négociateur et militant engagé | « Détenteur d’un Master en Droit obtenu à l’Université Lumière de Lyon en France, Ivor Tan Yan est engagé dans la lutte pour les droits des travailleurs. Il a également participé activement dans le combat contre la carte biométrique en 2014 et le combat écologique mené par le « Kolektif Ekolozik Albion » pour la préservation d’Albion et de Pointes-aux-caves. Il est également engagé dans le combat contre la corruption auprès de l’organisation « Youth Against Corruption ». Sur la scène politique, c’est comme secrétaire général du parti 100% Citoyens qu’il promeut le mauricianisme comme solution politique pour une meilleure société mauricienne. »

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